Former le jugement

« Savoir par cœur n’est pas savoir » dit Montaigne. Souvent j’entends des personnes dire que l’instruction aujourd’hui nous prépare une jeunesse avec des lacunes sévères par rapport à nos « anciens ». Même si je déplore parfois un nivellement vers le bas dans les apprentissages, je reste mesurée et confiante. Aimer le savoir et vouloir le partager ne suffit plus aujourd’hui. Nous sommes confrontés à des jeunes qui ne voient pas tout de suite le sens d’apprendre. En relisant Montaigne, je me suis replongée dans sa conception de l’instruction. Il a directement abordé ces questions et les historiens de l’éducation se sont accordés à le saluer comme un des pères de la pédagogie. J’aimerai partager avec vous ses idées.

Il reproche surtout ce qu’il appelle l’érudition indigeste, l’entassement de connaissances stériles, qui farcissent la tête sans la former, et la déforment plutôt. Sa préoccupation dominante en pédagogie, c’est de former le jugement et il recommande de développer l’initiative de l’élève. Pour lui, une autre façon d’éveiller le jugement personnel de l’élève, c’est la curiosité : « Il se tire une merveilleuse clarté pour le jugement humain de la fréquentation du monde. (…) Qu’on mette en fantaisie à l’enfant une bonne curiosité de s’enquérir de toutes choses». En un mot, à la culture de la mémoire seule, à « l’éducation livresque », comme il l’appelle Montaigne , substitue des exercices de jugement et la culture de la pensée. Cela fait rêver…

Aurélie Ethuin Lonoy