Stupeur et tremblements

Cet intitulé est le titre d’un roman écrit par Amélie Nothomb et parut en 1999. Cela fait référence au protocole japonais qui imposait en présence de l’empereur (considéré jusqu’en 1946 comme un dieu vivant), de réaliser avec stupeur et tremblements sa révérence. Cette histoire expose le système japonais du monde du travail comme un système écrasant, excluant et amenant certains employés à la démission. Une démission provoquée par l’ostracisme qu’ils subissent.

Plus de vingt ans après, ce roman me paraît encore très juste. La différence de mentalité avec l’Occident n’est plus si « franche » à mon sens. Proche de nous, nous pouvons assister à cette « culture d’entreprise » qui maltraite et qui, sans en avoir l’air, vous pousse à bout afin que ce soit vous qui « jetiez l’éponge » en démissionnant. Ainsi, elle a le « beau rôle » et crée l’illusion que c’est l’autre qui ne convient pas. Pouvons-nous encore prétendre que ces pratiques soient fantasmées ou lointaines?

Je ne le crois pas. La difficulté d’intégration n’est pas que culturelle, elle est aussi assujettie au « dieu argent ». Ce qui devrait être inacceptable, ce sont les pratiques d’exclusion qui mettent en péril l’intégrité émotionnelle des personnes. En tant que chrétiens, pouvons-nous accepter cela? Il est évident que non. En tant que chrétiens, subissons-nous aussi ces pratiques? Il est évident que oui. Dans le roman, le personnage d’Amélie fait preuve d’une force morale peu commune tout en y alliant de l’humour. Rire pour ne pas pleurer (dit un proverbe Yiddish). Et nous, que nous soyons victimes ou témoins, agirons-nous? Ou serons-nous figés de stupeur et pris de tremblements?

Aurélie Ethuin Lanoy